10 jours, 1 vie

603704_10152101022113321_3944084194687726882_nSamedi 17 mai, 15h30
Difficile d’écrire quand on n’est jamais seul et qu’on passe la moitié du temps sur la route. De toute façon, la vie est aujourd’hui trop belle pour être écrite. Je passe les heures à apprécier chaque moment, à me découvrir, à vivre. Je pense dans l’instant, je vis dans le mouvement.

C’est raffraichissant de voir tant de nature. Vert par terre, bleu dans l’air. L’Allemagne est en ce sens surprenante. Son coeur respire d’espace et de beauté alors que ses frontières sont dévastées par l’industrie. L’Europe est dépassée. Elle mise encore sur un système voué à gangréner notre planète et ses habitants. Les Etats-Unis aussi sont perdus. Etre fier de puiser les sols de toutes leurs substances est un gage de leur folie et une rupture avec les générations à venir. L’être humain ne peut pas voir au-delà de sa propre vie, de ces quelques années qui ne sont qu’une infime fraction de seconde pour l’univers qu’il empoisonne, petit à petit. Qui établira un programme pour plusieurs décennies ? Pour plusieurs siècles ? Qui tentera un jour de panser les plaies de notre univers ?

Nous traversons les frontières et rejoignons la France direction Colmar. Le relief s’élargit, les champs restent vastes et dehors, sous ces épais nuages blancs qui flattent les hauteurs, tout est beau. Les vallées se dessinent franchement, les villages apparaissent, pourtant, un goût amer accompagne le mot « France », pays où l’on parle français et rien d’autre. C’est bien le seul endroit où l’on ne fait aucun effort avec les langues… Nous jouons ce soir au Grillen avant de partir pour la Suisse et finir enfin la tournée là où elle a commencé, en Allemagne, cette fois à Essen (la première date a eu lieu à Berlin). Jusque là, tout se déroule à merveille. Espérons que le voyage n’en soit qu’au début de son élan.

10300081_10152111996973321_8623872301846346772_nMercredi 21 mai, 16h09
Les trois journées passées à Colmar ont contribué à soutenir l’affirmation suivante : je préfère être un homme d’action plutôt qu’un homme d’observation. J’aime lire, écrire, regarder, penser, mais je préfère être acteur. Le centre de la ville aura en tout cas été rempli de surprises, tant dans son architecture que dans ses rencontres. Il est encore trop tôt pour en juger mais l’une d’elles a déjà posé les bases d’un nouveau rapport à l’amour. Un rapport neuf, inconditionnel et jeune, à l’inverse des vieilles batisses aux couleurs pâles, parfois âgées de plus de quatre cents ans, qui surplombent les trottoirs de la ville.

Nous sommes en route pour Essen où nous jouerons le dernier concert de notre tournée. Nous traversons donc de nouveau l’Allemagne pour boucler la boucle. Je mène en ce moment la vie que je veux. Voyager, agir, vivre, voilà tout. Je ne veux pas rentrer. Je ne veux pas me figer à un endroit. Advienne que pourra.

Jeudi, 15h00
Je n’ai pas parlé de Pratteln (Suisse), mais le dépaysement a bel et bien été de mise. Passez la frontière et vous en jugerez vous-même : c’est une autre planète où le mot luxure ne semble pas avoir la même valeur que chez nous.
La campagne de Hünxe où nous avons dormi cette nuit nous aura raffraichit les idées. C’est sur la fin de cette tournée que je remplis ce cahier avec ces mots : j’aime vivre.

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Seul dans ma chambre, je n’ai plus que mes souvenirs et quelques objets remplis d’histoires pour illustrer ces dix derniers jours. Un cahier rempli de notes si pauvres, les pass des salles foulées par nos pieds, des cartes de visites et une petite cygogne… Dix jours aussi intenses équivalent sans aucun doute à dix mois de routine, les voyageurs vous le diront tous. Il me semble connaitre des personnes avec qui je n’ai passé que quelques heures bien mieux que d’autres que je côtoie depuis toujours, et que la semaine dernière s’est passée il y a un an. Le mouvement me hante désormais par son absence, ou plutôt par sa présence amoindrie. Je l’espère, le mouvement, comme l’on respire.

Une réflexion sur “10 jours, 1 vie

  1. La Routine d'un Marvin

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